Faute de candidats, Medicago prend du retard dans son essai clinique


La biopharmaceutique québécoise Medicago a pris du retard dans le recrutement des 30 000 candidats nécessaires pour terminer la phase 3 de l'essai clinique de son vaccin contre la COVID-19. L'entreprise a cessé de recruter au pays et aux États-Unis, se tournant plutôt vers l'Amérique du Sud, où le virus fait des ravages.

Les employés de Medicago travaillent d'arrache-pied depuis 16 mois afin de développer un candidat-vaccin contre le virus SRAS-CoV-2. Grâce à un financement de 173 millions de dollars du gouvernement fédéral, l'entreprise espérait récolter le fruit de ses efforts cet été en obtenant une homologation de Santé Canada.

Cette cible sera vraisemblablement ratée.

La phase de 3 de l'essai clinique est en effet plus compliquée que prévu. C'est très difficile en ce moment de gérer une étude de phase 3 avec les programmes de vaccination dans la plupart des pays du monde, atteste le Dr Brian Ward, médecin-conseil chez Medicago.

Sur les 30 000 candidats espérés, Medicago en a pour le moment trouvé un peu moins de 20 000. Parmi les pays retenus pour le recrutement, le Canada, les États-Unis et l'Angleterre se sont avérés moins productifs que prévu, plusieurs vaccins y étant déjà disponibles pour la population.

L'équipe a donc décidé de cesser le recrutement dans ces trois pays et de tourner le regard vers l'Amérique latine.

Amérique du Sud

Les efforts sont maintenant concentrés au Brésil et en Argentine, où le coronavirus continue de progresser. Ça va assez vite, assure le Dr Ward. À son avis, le virus est si actif dans ces deux pays que la cible des 30 000 volontaires pourrait être atteinte d'ici la fin du mois de juillet.

Si tout se passe comme prévu et selon le meilleur scénario envisagé, Medicago pourrait n'accuser qu'un mois de retard sur son itinéraire initial. Notre vision la plus optimiste était une analyse des résultats au début du mois d'août. Maintenant, c'est fin août ou début septembre. On parle de quelques semaines, un mois. Ce n'est pas grand-chose comme délai, poursuit le Dr Ward.

Toujours en profitant d'une voie rapide et si tout se déroule sans un nouveau problème, le candidat serait enfin autorisé avant l'hiver.

Restera ensuite à assurer une capacité de production pour ledit vaccin. Medicago détient actuellement des installations aux États-Unis. Une usine est toujours en construction à Québec et doit entrer en service quelque part en 2023.

Question d'éthique

Le Dr Marc Dionne, chercheur clinicien en vaccination au CHUCentre hospitalier universitaire de Québec, qui participe aux travaux avec Medicago, affirme pour sa part que la phase 3 de l'étude clinique s'est butée à une question éthique en cours de route.

Ça devenait difficile de poursuivre cette étude avec un placebo, quand il existe un vaccin sur le marché qui est accessible. Sur le plan éthique, on ne peut pas vraiment faire une étude avec un placebo, explique-t-il.

Le contexte épidémiologique n'a pas non plus aidé. Si la phase 2 d'un essai clinique permet de vérifier la réponse immunitaire d'une personne recevant le vaccin, la phase 3 vise à mesurer l'efficacité de l'inoculation contre le développement de la maladie.

Autrement dit, il nous faut des personnes malades, ajoute le Dr Dionne. L'étude clinique de phase 3 est arrivée au moment où la COVID-19 était en chute libre dans la province et au Canada, au printemps. Il est donc devenu impératif pour Medicago de se tourner vers des pays chauds, où l'accès au vaccin n'est pas aussi répandu dans la population.

David Rémillard, avec les informations de Guylaine Bussière